The Present Institutions of the International from the Point of View of the Future (1869)

In the Archives Bakounine, this text is attributed to César de Paepe.

Les institutions actuelles de l’Internationale
au point de vue de l’avenir.

L’Association internationale des Travailleurs porte dans ses flancs la régénération sociale.

Il en est beaucoup qui conviennent que si l’Association vient à réaliser son programme, elle aura effectivement instauré le règne de la justice, mais qui croient que certaines institutions actuelles de l’Internationale ne sont que temporaires, et destinées à disparaître. Nous voulons montrer que l’Internationale offre déjà le type de la société à venir, et que ses diverses institutions, avec les modifications voulues, formeront l’ordre social futur.

Examinons donc sous quelle structure se présente actuellement l’association, en prenant les types les plus complets, car grand nombre de sections ne sont pas encore arrivées à une organisation parfaite.

La section est le type de la commune. Là sont réunis les ouvriers de tous les métiers sans distinction. Là doivent être traitées les affaires qui intéressent tous les travailleurs, quelle que soit leur profession.

A la tête de la section est un Comité administratif, qui est charge d’exécuter les mesures décrétées par la section. Au lieu de commander comme les administrations actuelles, il obéit à ses administrés.

Le Conseil fédéral est compose des délégués des différents groupes ouvriers ; à lui les questions de rapports entre les différents métiers, d’organisation du travail. C’est là une lacune de nos gouvernements actuels, qui ne représentent qu’une tourbe confuse d’individus au lieu de représenter des groupements d’intérêts.

Les différentes sociétés groupées au Conseil fédéral sont des sociétés de résistance. Ces sociétés appartiennent aussi bien à l’avenir qu’au présent. Groupant autour d’elle les ouvriers d’un même métier, leur apprenant à leurs intérêts, à calculer le prix de vente et le prix de revient pour baser là-dessus leurs prétentions, la société de résistance est destinée à organiser le travail dans l’avenir, bien plus que la société de production, qui, dans l’état actuel, ne peut guère prendre d’extension. Rien de plus facile, lorsque le moment sera venu, que de transformer les sociétés de résistance en ateliers coopératifs, lorsque les ouvriers se seront entendus pour demander la liquidation de la société actuelle, qui leur fait perpétuellement banqueroute.

Les sociétés coopératives de consommation, qui se sont établies dans la plupart des sections, sont dessinées à remplacer un jour le commerce actuel, plein de fraudes et d’embûches, elles se transformeront en bazars communaux, où les différents produits seront exposes avec indication exacte des expéditions sans autre surtaxe que le paiement des frais.

Les caisses de secours mutuel et de prévoyance, prendront un plus vaste essor et deviendront des sociétés d’assurance universelle. Maladies, infirmités, vieillesse, veuvage, toutes ces sources actuelles de misère seront écartées. Plus de bureaux de bienfaisance, l’assistance publique déshonore ; plus d’hôpitaux où l’on est admis par charité. Tous les soins que l’on recevra auront été payés ; il n’y aura plus de médecins des pauvres.

L’ignorance, autre source de misère, disparaitra devant l’instruction donnée par chaque section. Il ne s’agit pas de cette instruction que nos doctrinaires même réclament à grands cris. Nous voulons former des hommes, et l’on n’est un homme complet que lorsqu’on est travailleur et savant en même temps ; aussi tous les travailleurs réunis au Congres de Bruxelles en septembre dernier, ont-ils réclamé l’instruction intégrale qui comprend à la science et l’apprentissage des métiers. Cette instruction ne pouvant se donner actuellement, par suite d’empêchements matériels, les sections y suppléent du mieux qu’elles peuvent, en organisant des meetings, des conférences, en fondant des journaux, où l’on enseigne aux ouvriers les droits de l’homme, où on leur apprend à les revendiquer, où enfin l’on rassemble les matériaux pour l’édifice de la société future.

Le problème d’organisation de la justice est déjà résolu au sein de l’Internationale. Les caisses de défense remplissent cet objet. Elles ont leur côté d’actualité, en ce sens, qu’après avoir examiné la cause, le Comité de défense décide si l’affaire sera soutenue en justice, lorsqu’un ouvrier a à se plaindre d’une injustice commise par son patron. Mais cette institution regarde aussi l’avenir, en ce qu’elle décide des contestations entre membres au moyen d’un jury choisi par l’élection et renouvelable dans un délai très court. Dans l’avenir plus de chicaniers, de juges, de procureurs, d’avocats. La même droit pour tous, et la justice basée, non plus sur tel ou tel texte plus ou moins embrouillé autour duquel on dispute, mais sur la raison et la droiture.

Les différentes sections sont reliées à leur tour en fédération, par bassins, puis par pays. Ces fédérations comprennent non seulement un groupement par sections, mais encore un groupement par corps de métier, comme cela existe pour les communes. Ainsi seront facilités les relations entre les différents groupes, ainsi le travail pourra être organisé, non pas seulement au sein des communes, mais au sein du pays tout entier.

De vastes institutions de crédit seront comme les artères et les veines de cette organisation. Le crédit ne sera plus ce qu’il est aujourd’hui, un instrument de mort, car il sera basé sur l’égal échange : ce sera le crédit au prix de revient.

Si l’Internationale n’a pu encore, dans l’état actuel, fonder une institution de ce genre, au moins elle en a déjà discuté les principes et les statuts aux Congres de Lausanne et de Bruxelles. A ce dernier Congres, un projet de banque d’échange a été présenté par la section bruxelloise.

Enfin les rapports entre les différents pays sont assurés par un Conseil général international. Telle sera la diplomatie future : plus d’attachés d’ambassade, plus de fringants secrétaires de légation, plus de diplomates, de protocoles, de guerres.

Un bureau central de correspondance, de renseignement et de statistique, voilà tout ce qu’il faut pour relier les nations unies par un lien fraternel.

Nous croyons maintenant avoir montré que l’Internationale renferme en germe dans son sein toutes les institutions de l’avenir. Que dans chaque commune, il s’établisse une section de l’Internationale, et la société nouvelle sera formée et l’ancienne s’écroulera d’un souffle. Ainsi, lorsqu’une plaie se cicatrise, l’on voit au-dessus se former une escarre tandis que la chair se rendorme lentement en dessous. Un beau jour, la croûte tombe, et la chair apparaît fraîche et vermeille.

The Present Institutions of the International
from the Point of View of the Future.

The International Workingmen’s Association bears social regeneration within itself.

There are many who agree that if the Association should realize its program, it will have effectively established the reign of justice, but who believe that certain present institutions of the International are only temporary and are destined to disappear. We want to show that the International already offers the model of the society to come and that its various institutions, with the required modifications, will form the future social order.

So let us examine the structures in which the association currently presents itself, taking its most complete examples, for a great number of sections have still not arrived at a perfect organization.

The section is the model of the commune. There the workers of all trades are gathered without distinction. There we must address the affairs that concern all the workers, whatever their profession.

At the head of the section is an Administrative Committee, which is charged with carrying out the measures decreed by the section. Instead of commanding, like the present administrations, it obeys the citizens.

The Federal Council is composed of the delegates of different worker groups; to it [are assigned] questions of relations between the different trades and of the organization of labor. This is a gap in our present governments, which only represent a confuse rabble of individuals instead of representing groups united by interests.

The different societies gathered in the Federal Council are societies of resistance. These societies also belong as much to the future as to the present. Gathering around them the workers of a single trade, teaching them their interests, to calculate the sale price and cost price in order to base their expectations on it, the society of resistance is destined to organize labor in the future, much more than the society of production, which, in the present state, can hardly be expanded. Nothing will be more easy, when the moment comes, than to transform the societies of resistance into cooperative workshops, when the workers have agreed to demand the liquidation of the present society, which bankrupts them perpetually.

The cooperative consumer societies, which are established in the majority of sections, are destined one day to replace the present commerce, full of frauds and pitfalls; they will transform themselves into communal bazaars, where the different products will be displayed with exact indication of the consignments, without any other surcharge but the payment of the costs.

The mutual assistance and provident funds, will take on a wider expansion and become societies of universal insurance. Sickness, disability, old age, widowhood and all these present sources of poverty will be swept away. No more charity office, public assistance dishonored; no more hospitals where one is admitted on charity. All the care that one will receive will have been paid for; there will no longer be doctors for the poor.

Ignorance, that other source of poverty, will disappear in the face of the education given by each section. It is not a question of that training that even our doctrinaires demand in loud cries. We want to make men, and one is only a complete man when one is a laborer and scholar at the same time; and have not all the workers gathered at the Congress of Brussels last September demanded integral education that includes science apprenticeship in the trades. That instruction being presently impossible, as a result of material impediments, the sections compensate as best they can, by organizing meetings and conferences, by founding newspapers, where the workers are taught the rights of man, where they are taught to claim them, where finally we assemble the materials for the edifice of the future society.

The problem of the organization of justice is already resolved within the International. The defense funds will accomplish that aim. They have their current relevance, in the sense that having examined the case, the Defense Committee decides if the affair will be upheld in justice, when a worker has to complain of an injustice committed by their boss. But that institution also looks toward the future, in that it decides contestations between members by means of a jury chosen by election and rapidly renewable. In the future, no more quibblers, judges, prosecutors or attorneys. The same rights for all and justice based, no longer on some more or less muddled text, about which we quarrel, but on reason and rectitude.

The different sections are connected in their turn by federation, by basins, then by country. These federations include not only a grouping by sections, but also by trades, as that exists in the communes. So the relations between the different groups will be facilitated and labor can be organized, not only within the communes, but within the entire country.

Vast institutions of credit will be like the veins and arteries of that organization. Credit will no longer be what it is today, an instrument of death, for it will be based on equal exchange: it will be credit at cost-price.

If the International has not yet been able, in its present state, to establish an institution of this sort, at least it has already discussed its principles and statutes at the Congresses of Lausanne and Brussels. At that latest Congress, a plan for a bank of exchange has been presented by the Brussels section.

Finally, the relations between the different countries are dealt with by an international General Council. Such will be the future diplomacy: no more embassy attachés, no more smartly dressed diplomatic secretaries, no more diplomats, protocols or wars.

A central office of correspondence, information and statistics would be all that is necessary to connect the nations united by a fraternal bond.

We now believe that we have shown that the International contains within itself the seeds of all the institutions of the future. Let a section of the International be established in each commune; the new society will be formed and the old will collapse with a sigh. Thus, when a wound heals, we see a sore form above while the flesh slowly settles itself below. One find day, the scab falls off, and the flesh appears fresh and ruddy.

Working Translation by Shawn P. Wilbur

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Independent scholar, translator and archivist.