Louise Michel, “The Claque-Dents,” Ch. III


[Chapter II]


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III

Old Hermann went straight on, hardly knowing where he would stop.

His house had long since been passed when he began to notice fatigue. So, regardless of eyes fixed on him, the old man made himself at home on a heap of stones piled up by workers at a street corner.

The veil hung in the old man’s hands. as he had entirely forgotten all that had happened. He wiped his brow with it, taking it for his handkerchief.

Sylvestre followed constantly.—Old Hermann’s appearance gave him the shudders. But he was quite wrong, for the old man hardly thought of him. His mind floated uncertainly, and his open eyes did not see.

A policemen, struck by the musician’s strange appearance, approached him.

“Are you waiting for something there, my good man?”

“Yes,” he said, without really knowing.

At that moment, a terrible explosion spread terror up and down the street

It was a more or less harmless pyrotechnic that some practical joker had set off. It was January, and at that time those sorts of toys are very easy to purchase.

The alarm was so great that the police stopped everyone, thinking they saw dynamiters everywhere.

A youngster being caught making a reproduction of the explosion with the aid of a paper sack, all the shops closed and the street was swept by a swarm of guardians of the peace whose little cloaks fluttered like wings and whose tall boots gave the appearance of birds’ feet. One would have said they were a flock of crows.

There were a few arrests. Old Hermann, without knowing what he did, followed those arrested, and, alost without knowing why, was swallowed up with the others at the station.

Sylvestre had left him there, not caring to risk an inquiry. Although they seldom take the side of truth, he could have bad luck.

“This old man,” he thought, “gives me the impression of being a clever one. As for me, I will keep an eye on him.”

Sylvestre, the man with the soft eyes, with the angelic face, waiting for the opportune time to slay his victims and the right time to cover his tracks, did not hurry in the present circumstances, although he had to ward off two dangers, the one that seemed to come from Old Hermann and the other, coming from the circumstances; he had felt obliged, in order to follow the old man, to abandon to the care of the Hôtel des Ventes the purchases he had made.

But on these occasions, the fewer obvious precautions one takes, the better—papers left in plain view, attached to a nail in the wall with notes for the milkman or baker, folded as bookmarks in novels, escape police searches. Sylvestre, moreover, was above these simple principles, he had an enormous experience with all the procedures, not engaging in any act before making a reconnaissance, after which he followed or ignored the tracks.

Sometimes he became lost, and he wandered still, but he found himself in the twists and turns of his lies, and thought that he would always find himself. Sylvestre went peacefully in his circle; those who saw him pass followed him with a trusting regard, and he, from time to time, before the grim face of some rebel dreaming of egalitarian justice, before the blazing eye of one dying of hunger, said to himself: There is a rogue’s mien! a sinister face! Perhaps he even thought so.

After a night passed in the cells, jumbled up with the vermin and the extraordinary gossip of the starving, desperate and miserable of all sorts, some delirious, and the others glazed over.

The good Hermann was completely delirious.

It is under this impression that he confessed to the investigating judge Mancastel to being the author of the second explosion (that of the paper bag), whose real author still ran around laughing at the fright caused by his childish prank.

This is why the father Hermann, accused of plotting against the security of the state, was held in the utmost secrecy.

In the end, he identified so strongly with a character from the Opéra for which he had played the harmonic part, that he began, by way of response, to recite the role of conspirator in the piece, a man named Noirel who planned the death of tyrants.

Mancastel, having a tinge of literature was sometimes surprised to find a rhythm in the revelations by Old Hermann of his black intrigues, but as this rhythm was disfigured by the cock and bull stories and the orthographic fantasies of the clerk, he paid no heed, already thinking of the glory and the profit that could come from him from his skill at uncovering all that he was told by the old musician.

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III

Le père Hermann allait droit devant lui, ne sachant guère où il s’arrêterait.

Sa maison était dépassée depuis longtemps, quand il commença à s’apercevoir de la fatigue.

Alors, sans se soucier des regards fixés sur lui, le vieillard s’établit comme chez lui, sur un tas de pierres entassées par des ouvriers au coin d’une rue.

Le voile flottait dans les mains du vieillard comme il avait parfaitement oublié tout ce qui venait de se passer, il s’en essuyait le front le prenant pour son mouchoir.

Sylvestre suivait toujours—l’allure du père Hermann lui donnait le frisson et il avait bien tort, car le vieux ne songeait guère à lui, sa pensée flottait indécise, ses yeux ouverts ne voyaient pas.

Un agent, frappé de l’air étrange du musicien, s’approcha de lui. .

— Vous attendez quelque chose là, mon brave homme.

— Oui, répondit-il, sans savoir.

A ce moment, une explosion terrible répandit la terreur dans toute la rue.

C’était une boîte à peu près inoffensive dont un mauvais plaisant avait fait l’essai. On était en janvier et ces sortes de jouets sont à cette époque d’une grande facilité d’achat.

La frayeur fut si grande que les agents s’arrêtaient les uns les autres croyant voir partout des dynamiteurs.

Un gamin s’étant avisé de produire une reproduction d’explosion à l’aide d’un sac de papier, toutes les boutiques se fermèrent et la rue fut balayée par une nuée de gardiens de la paix dont le petit manteau voletait comme des ailes et dont les longues bottes faisaient l’effet de pattes d’oiseau, on eût dit une nuée de corbeaux.

Il y eut quelques arrestations; le père Hermann, sans savoir ce qu’il faisait, suivit les gens arrêtés et sans savoir également pourquoi on l’engouffra avec les autres au dépôt. Sylvestre l’avait abandonné là, ne se souciant pas de risquer une enquête; quoiqu’elles soient de coutume contre la vérité, il pouvait avoir mauvaise chance.

— Ce vieux, pensait-il, me fait l’effet d’être un homme habile, je vais le surveiller de mon côté.

Sylvestre, l’homme aux doux yeux, à la mine angélique, prenant le temps opportun pour occire ses victimes et le temps opportun pour en bien cacher la trace, ne se pressa donc pas dans la circonstance présente, quoiqu’il eût à parer à deux dangers, celui qui lui semblait venir du père Hermann, et l’autre, venant des circonstances; il s’était cru obligé pour suivre le vieillard d’abandonner aux soins de l’Hôtel des Ventes les achats faits par lui.

Mais dans ces occasions, moins on prend de précautions apparentes, mieux cela vaut—les papiers laissés à la vue de tous, attachés à un clou au mur avec des notes du laitier ou du boulanger, pliés en signets dans des romans, échappent aux perquisitions. Sylvestre, du reste, était au-dessus de ces principes enfantins, il avait une expérience énorme de toutes les filières, n’engageant rien avant d’avoir fait une reconnaissance après laquelle il suivait ou négligeait les pistes.

Parfois il s’était égaré, il s’égarait encore, mais il se retrouvait dans les méandres de ses mensonges, il pensait se retrouver toujours.

Sylvestre alla paisiblement à son cercle; ceux qui le voyaient passer le suivaient d’un regard confiant, et lui, de temps à autres, devant quelque visage sombre de révolté rêvant la justice égalitaire, devant l’œil flamboyant d’un meurt-de-faim, se disait : Voilà une mine de gueux ! un visage patibulaire !

Peut-être même qu’il le pensait.

Après une nuit passée au dépôt, pêle-mêle avec la vermine et les racontars fantastiques des affamés, des désespérés, des misérables de toutes sortes, les uns sont dans le délire, les autres glacés.

Le bonhomme Hermann était absolument dans le délire.

C’est sous cette impression qu’il avoua au juge d’instruction de Mancastel être l’auteur de la seconde explosion (celle du sac à papier), dont l’auteur courait encore riant de l’effroi causé par sa gaminerie.

C’est pourquoi le père Hermann, accusé de complot contre la sûreté de l’Etat, fut maintenu dans le secret le plus absolu.

Si bien qu’il finit par s’identifier à un personnage de l’Opéra dont il avait vécu la partie harmonique, et se mit, en guise de réponse, à réciter le rôle du conspirateur de la pièce, un nommé Noirel qui préparait la mort des tyrans.

Mancastel ayant une teinte de littérature s’étonna parfois de trouver un rythme aux révélations du père Hermann sur ses noires menées, mais comme ce rythme était défiguré par les coq-à-l’âne et les fantaisies orthographiques du greffier, il passa outre, songeant déjà à la gloire et au profit qui pouvaient lui revenir de son habileté à découvrir tout ce qui lui était conté par le vieux musicien.

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[Chapter IV]


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