Jeanne Marie, “Revelation” (1849)

[“Jeanne Marie” (probably Jeanne-Marie Monniot) also contributed this poem to l’Opinion des Femmes. A literal translation follows.]

Révelation.

Mère, comme il fait froid! la terre est toute blanche;
Le mont, déjà trois fois, a roulé l’avalanche;
Un instant a suffi pour chasser les beaux jours
Et dépouiller le val de verdure et d amours.
Les oiseaux frissonnants désertent le bocage,
La plaine est comme un lac immense et sans rivage,
Les pauvres voyageurs errants sur les chemins.
Qu’ils sont infortunés, mère, et que je les plains,
Alors qu’auprès de l’âtre où la flamme pétille,
Lisant à la lueur de la lampe qui brille,
J’entends gronder au loin l’orage, les autans.
A cette heure je prie et conjure les vents
D’épargner le marin qui brave la tempête
Et d’écarter la mort qui plane sûr sa tête;
De faire luire à l’œil du pêcheur malheureux
Quelque fanal béni, quelque point lumineux.
Et lorsque j’ai prié, mon âme est plus contente;
J’entends vibrer en moi comme une voix puissante.
Elle dit : La prière, élan de charité,
Prend le chemin du ciel avec sécurité
C’est le plus pur encens, la plus douce harmonie,
Qui puisse jusqu’à Dieu monter de cette vie
Quand les hommes entr’eux auront assez aimé,
Ils reverront l’Eden à leurs regards fermé
Pour eux, dès ce moment, dépouillé de mystère,
Et sans l’arbre fatal qui perdit notre mère.
Humains, hâtez-vous donc d’amener ce beau jour,
Aimez! aimez encore, Dieu n’est que pur amour!
. . . . . . . . . . .
. . . . . . . . . . .
Mère. que pensez-vous de cette voix étrange ?
Je pense, enfant béni, que vous êtes un ange,
Auquel, dès ici-bas l’esprit s’est révélé;
Qu’à vous, comme à Moïse, au Christ, il a parlé
Comme eux, il vous faut donc, martyr en cette vie,
Vous résoudre aux douleurs, même à l’ignominie,
Pour prêcher aux humains la loi de vérité,
Qui vous fut dévoilée en un jour de bonté.
Hélas dussiez-vous ne trouver en ce monde,
Qu’injustice et dédain, qu’amertume profonde,
Etre traité de fou, d’infâme, d’imposteur!
Prêchiez, prêchez toujours et laissez au Seigneur
Le soin d ouvrir les yeux à la foule insensée!
Le soldat de son chef connait-il la pensée?
Il marche cependant sur un seul mot de lui,
Prêt à verser son sang demain comme aujourd’hui.
Qu’importe si le grain meurt au sein de la terre
Alors qu’on voit sortir la gerbe de l’ovaire?
Et qu’importe au semeur qu’un autre ait récolté,
Si son salaire un jour est l’immortalité?

Jeanne Marie.

Revelation.

Mother, how cold it is! The mountain is all white;
Three times already the avalanche has rolled;
A moment is enough to banish the fine weather
And strip the valley of greenery and love.
The shivering birds desert the hedges,
The plain is like a huge lake, without shores,
The poor travelers wander the roads.
They are so ill-fated, mother, and I pity them,
While beside the hearth where the flame crackles,
Reading by the light of the lamp that glows,
I hear the storms rumble in the distance, the Autans.
At that hour I pray and conjure the winds
To spare the sailor who braves the storm
And ward off the death that hovers over his head;
To shine in the eye of the unfortunate fisherman
Some blessed lantern, some luminous point.
And when I have prayed, my soul is more content;
I hear within me something like a powerful voice vibrate.
It says: Prayer, impulse of charity,
Takes the road to heaven with security
It is the purest incense the sweetest harmony,
Which can rise all the way to God from this life!
When men have loved one another enough,
They will see again the Eden lost to sight
From that moment, stripped of mystery,
And without the fatal tree that doomed our mother.
Humans, hasten then to bring about that good day,
Love! Love more! God is only pure love!
. . . . . . . . . . .
. . . . . . . . . . .
Mother, what do you think of this strange voice?
I think, blessed child, that you are an angel,
To whom, here below, the spirit has revealed itself;
That to you, as to Moses, to Christ, it has spoken
Like them, then, you must be a martyr in this life,
Resolve yourself to sorrows, even to ignominy,
To preach to humans the law of truth,
Which was unveiled to you one bountiful day.
Alas, though you find in this world,
Only injustice and disdain, only deep bitterness,
To be treated as mad, infamous, an imposter!
Preach, preach always, and leave it to the Lord
To open the eyes of the foolish mob!
Does the soldier know the thought of his commander?
Yet he marches at a single word from him,
Ready to shed his blood tomorrow as today.
What does is matter if the grain dies within the earth
When we see the sprout issue from the seed?
And what matter to the sower that another has reaped,
If their wage one day is immortality?

Jeanne Marie.
[From l’Opinion des Femmes, 1, 3 (April 10, 1849) 6. Working translation by Shawn P. Wilbur.]
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