Proudhon’s “What is Property” reviewed in “La Phalange” (1840)

This is the review referrred to by Proudhon in the Second Memoir.


Nous extrayons de l’Impartial de Besançon un fort bon article contenant une réfutation d’un livre de M. Proudhon, intitulé : Qu’est-ce que la Propriété ? Cet article est l’ouvrage d’un de nos amis, M. Hippolyte Renaud, capitaine d’artillerie. Il est à remarquer qu’aucun des journaux plus ou moins conservateurs, qui nous accusent quelquefois de vouloir détruire la Propriété, sans d’ailleurs donner aucune preuve à l’appui de leurs accusations, n’a essayé de réduire à leur juste valeur les fausses théories dirigées récemment contre la Propriété par les Egalitaires, Communistes et Bavouristes. Il fallait qu’un phalanstérien, c’est-à-dire un ennemi de la Propriété, suivant l’opinion de quelques-unes des feuilles qui nous combattent sans nous connaître, produisît en faveur de la Propriété les argumens que ne savent pas trouver les prétendus défenseurs de la Propriété.

Qu’est-ce que la propriété ? Par J.-B. Proudhon.

Paris, 1840.

Qu’est ce que la propriété ? Tel est le titre d’un mémoire de M. Proudhon; telle est la question, grosse peut-être de plus d’une tempête, qu’il pose témérairement, et qu’il sabre, plus témérairement encore, par cette réponse : La propriété, c’est le vol !

Le prolétaire n’a rien à réclamer, disent les uns : le propriétaire est un voleur, répond M. Proudhon. Où peuvent conduire, mon Dieu ! d’aussi inintelligentes négations ?

N’est-il pas évident, à priori, que chaque homme a le droit de vivre ? Est-il moins évident, pour tout autre que pour un philosophe, que chaque homme a le droit de jouir du fruit de son travail ? Le droit de vivre emporte le droit de travailler : le droit de jouir du fruit de son travail établit le droit de propriété.

Dans l’origine des choses, quelque part peut-être, las de poursuivre à coups de pierre les animaux sauvages, un homme employa ses loisirs à imaginer et façonner un arc : cet arc devint une propriété. Qui osera prétendre qu’un de ses compagnons, paresseux ou inhabile à imiter, a pu justement ravir cet arc en disant : A chacun son tour.

Et si l’homme industrieux, sentant que la possibilité de donner est le plus doux privilège de la richesse, fait un second arc pour un ami, qui dira que cet ami n’est pas devenu propriétaire à un titre également sacré?

Ainsi, l’homme est propriétaire légitime de ce qu’il a créé par son industrie, ou de ce qu’il obtient par l’abandon volontaire d’un précédent possesseur.

La propriété se trouve encore constituée, dit-on, par droit de premier occupant. Nous ne pouvons admettre ce principe dans sa signification absolue.

Certainement, Robinson, après avoir choisi et cultivé les champs qui lui étaient nécessaires, eût agi injustement s’il eût défendu à un nouveau naufragé la culture des autres parties de l’ile, où s’il eût exigé une redevance pour l’abandon des terres qu’il n’avait jamais possédées.

De son côté, le naufragé n’avait aucun droit sur les cultures et les récoltes préparées par Robinson.

Mais, dites-vous, M. Proudhon, s’il arrive successivement plusieurs naufragés, toutes les parties de l’ile seront bientôt occupées, et le dernier venu ne trouvera plus de place pour s’établir. Devra-t-il donc mourir de faim ou vivre d’aumônes ?

Ici se sont égarés tous les économistes : c’est pourquoi vous avez pu les combattre avec avantage. Mais vous n’avez pas répondu un mot à l’Ecole phalanstérienne, que vous devez connaître cependant, puisque vous l’attaquez en plusieurs occasions.

Eh bien ! le dernier survenant devait s’adresser en ces termes à ceux qui l’avaient devancé : « L’ile est le domaine commun de tous les naufragés; elle n’est pas un produit de votre industrie, c’est un don de Dieu ! Prenez ce qui est à vous, ce que vous avez créé, vos récoltes, vos ustensiles, l’amélioration donnée aux terres par le défrichement et la culture, amélioration qui peut en avoir trentuplé la valeur; mais le sol primitif, tel que vous l’avez trouvé en abordant ici, est à moi comme à vous; je veux ma part, mesurons et partageons !

» Et, si vous ne pouvez me rendre en nature ce qui est à moi, sans vous dépouiller de ce qui est vôtre, donnez-moi l’équivalent. »

Ainsi parlerait le prolétaire de l’ile : sa réclamation serait juste, elle devrait être écoutée. Donner à chacun ce qui lui est dû, concilier des droits en apparence opposés, tel serait le problème. Les économistes de ce coin de terre seraient mis en demeure, ils auraient à en donner la solution.

S’ils trouvaient plus commode de trancher la difficulté en disant au prolétaire : On ne te doit rien ! ils montreraient par-là leur impuissance et leur ignorance radicale touchant la question posée.

Et s’ils tranchaient encore, à votre manière, en disant : La propriété, c’est le vol ! ils feraient preuve d’une impuissance et d’une ignorance parfaitement égales.

Vous avez raison dans cette partie de votre livre où vous prouvez aux économistes qu’ils sont dans le faux Mais parce que vous dites précisément le contraire de ce qu’ils avancent, vous pensez être dans le vrai, et en cela vous avez tort.

Ils font pencher la balance à droite; entre vos mains, c’est à gauche qu’elle incline : aucun de vous ne pèse équitablement.

C’est que, croyez-le bien, toute théorie est fausse qui ne peut servir aux uns sans nuire aux autres. La vérité est conciliante par essence. Sans cela, la nature serait-elle intelligente ? Dieu serait-il bon ?

Nous ne pouvons exposer ici comment il est possible non-seulement de faire converger, mais encore de soutenir, de développer l’un par l’autre le droit du travailleur et le droit du détenteur de capitaux. Ce serait aborder la haute question de l’organisation du travail, question qui, grâce aux efforts de Fourier et de ses disciples, préoccupe en ce jour les meilleurs esprits. Je vous renvoie donc, pour votre complète édification, à une étude sérieuse des ouvrages de l’Ecole, ouvrages dont vous parlez, comme bien d’autres, avant d’avoir essayé de les comprendre.

D’autres déjà, le Saint-Simonisme, en dernier lieu, avaient accusé la propriété des douleurs de nos sociétés modernes. M. Proudhon les a dépassés tous de deux pas, deux grands pas en arrière. A chacun suivant sa capacité, à chaque capacité suivant ses œuvres ! disait le Saint-Simonisme. La capacité et le travail n’ont pas trouvé grâce aux yeux de M. Proudhon. Egalité, dit-il, c’est justice ! Donc à chacun la même rétribution, quel que soit son apport à la société en capital, en travail, en talent.

Qui donc accepterait volontairement le joug de cette écrasante égalité ? Qui donc renoncerait au légitime espoir de s’élever par le savoir et les services rendus ? C’est en vain que vous vous défendez du titre de philosophe, Monsieur Proudhon ; vous êtes un philosophe renforcé, puisque, selon le mode philosophique, au lieu e chercher la forme sociale qui convient à l’homme tel qu’il est, vous vous donnez mission de changer la nature humaine pour la plier à vos plans arbitraires, puisque vous prétendez étouffer dans le cœur de l’homme l’ambition, l’enthousiasme et les passions émulatives, qui ne peuvent s’y trouver que par la volonté du Créateur et pour le bien de tous.

Il est, du reste, une justice à rendre à l’auteur : il ne tend pas à éblouir son lecteur par des tableaux trop riants de cet avenir qu’il promet à l’humanité. C’est un lourd cauchemar que la lecture de ce livre : on est mal à l’aise, on étouffe dans le milieu social qu’il fait entrevoir. On se croit entouré de misérables, battus par les vents sur un navire sans boussole et sans gouvernail, se disputant les restes corrompus d’un approvisionnement qui va manquer. Capitaines, passagers, matelots, tous ont une part égale et rigoureusement pesée. Et ici c’est justice, car si l’un mange plus, c’est un vide plus grand dans l’estomac de ses compagnons de malheur. Aussi les raisonnements de M. Proudhon peuvent avoir quelque valeur, dès qu’il suppose l’espèce entière dans cet état désespéré.

Mais, en conscience, monsieur Proudhon, si vous poussez l’humanité hors de son grabat, c’est que vous avez à lui offrir un asile plus convenable. Or, le moins qu’elle soit en droit d’espérer, c’est la pleine et entière satisfaction, pour tous, des besoins matériels (nourriture, logement, vêtement): à quoi se réduisent dès-lors vos déclamations contre celui qui mange la part du voisin, quand tous auront pour toute leur vie le nécessaire, et un nécessaire très confortable, bien et solidement assuré ?

Votre égale rétribution fera-t-elle que l’un, plus beau ou plus spirituel, soit moins favorisé en amour; que l’autre n’obtienne une plus grande somme d’amitié, d’estime, de réputation, etc. ? Et si, comme vous le reconnaissez, vous ne pouvez atteindre à ces inégalités naturelles, qu’importe une inégalité de plus, inégalité bien moins enviable, puisqu’elle ne porte que sur les superfluités (j’emploie l’expression reçue) de la vie matérielle, le nécessaire, je le répète, étant accordé à tous et surabondamment ?

Vous allez voir d’ailleurs qu’à force d’admettre des inégalités, nous devenons les meilleurs amis de l’égalité, de la seule égalité qui s’allie avec la nature de l’homme.

Vous reconnaissez, avec Fourier, que la nature, dans sa prévoyance, a dû distribuer aux hommes des penchants et des vocations dans un rapport exact avec les travaux qu’ils auraient à exécuter. Ainsi, lorsque la science aura résolu le problème de mettre chacun à portée de la tâche qu’il doit accomplir, chaque œuvre trouvera nécessairement son ouvrier.

Vous auriez dû comprendre encore que l’homme est doué de plusieurs facultés physiques et intellectuelles, que toutes lui ont été données pour qu’il les emploie, et qu’il ne peut les exercer intégralement que par une diversité de fonctions donnant essor à toutes ses vocations.

Alors aucun ne se trouvera d’une manière absolue inférieur à tous les autres; tous montreront sur quelque point une supériorité relative. Ceci suffira pour la satisfaction de tous les amours-propres, parce que nous attachons toujours une haute importance à la chose que nous cultivons avec succès, parce que l’étendue de notre esprit est nécessairement en rapport avec la valeur de nos actes.

Ainsi, inégalité entre chacune de nos facultés physiques et intellectuelles, inégalité dans chaque rétribution qu’elles nous apportent, inégalité de capitaux ! Toutes ces inégalités conduiront à un équilibre en parfaite harmonie avec nos passions et nos désirs, tandis que votre égalité philosophique n’est qu’une chimère peu regrettable et contre nature.

L’héritage, quand chacun trouvera nécessairement ses fonctions, fonctions qu’il ne pourrait quitter, pour monter ou pour descendre, sans douleur pour lui et sans dommage pour la société; l’héritage, dis-je, quand le père sera sans crainte sur l’avenir de ses enfants dont la place dans la société est le résultat de leur nature même, l’héritage se déversera sur un grand nombre. Les descendants, les compagnons de travaux, les amis, les sympathiques en tout genre seront appelés. Alors, tous auront des chances pour recevoir; tous, comme dit Fourier, pourront gagner à cette loterie sans y avoir mis. Alors, l’héritage aura perdu sa profonde immoralité, parce que, réduit à cette proportion, il ne déterminera pas la position sociale de l’héritier, qui ne pourra plus se réjouir de la mort du testateur.

Il est à remarquer que les attaques un peu sérieuses de M. Proudhon s’adressent presque exclusivement à la propriété territoriale. Ses reproches, fussent-ils fondés, prouveraient simplement qu’il y a vice dans le mode d’exercice de la propriété, et qu’il doit recevoir une transformation.

Mais cela ne touche en rien au principe même de la propriété, qui consiste dans le droit de posséder un capital et d’en tirer un revenu. On ne peut conclure logiquement de la partie au tout.

J’ai affirmé que M. Proudhon n’avait rien compris à la doctrine phalanstérienne.

Pour justifier mon affirmation, je prends au hasard une des accusations qu’il nous porte. Je trouve vers la fin du livre, page 241 :

«….. Comment, implacables adversaires de la civilisation (les disciples de Fourier), lui empruntent-ils ce qu’elle a produit de plus funeste : propriété, inégalité de fortune et de rangs, goinfrerie, concubinage, prostitution, que sais-je ? théurgie, magie et diableries….. » Parmi ces reproches, aussi bien fondés l’un que l’autre, je choisis celui dont la réfutation allongera le moins cet article; je prends la goinfrerie : à vous, monsieur Proudhon, la responsabilité du terme.

Fourier veut que dès le bas âge on fasse l’éducation des sens, qu’on les développe par un exercice intégral et raffiné. Ce raffinement est recherché aujourd’hui pour l’ouïe, la vue et le tact. Fourier pense que l’exclusion de l’odorat et du goût n’est nullement motivée.

Donc de bonne heure on cultivera les sens, en cherchant à rendre l’enfant, et par suite l’homme fait, délicat et connaisseur en bonne chère comme en musique, en parfums comme en tableaux. Mais cette délicatesse du goût n’est-elle pas en tout l’opposé de la goinfrerie, qui consiste, si je ne me trompe, dans cette belle propriété dont jouissent certains estomacs d’absorber longtemps, beaucoup et sans choix.

Le reproche de goinfrerie ne pouvant se soutenir, vous allez passer à un autre : mais pourquoi ce raffinement, cette délicatesse, cette sensualité ? Tout cela n’est-il pas réprimé par une saine morale : puis le mépris de la table, le fameux brouet noir, la frugalité républicaine, etc.

D’abord je n’ai pas prétendu que l’homme ou l’enfant dussent manger au-delà de leur appétit. Je n’ai jamais vu qu’à table, les plus fins connaisseurs fussent plus souvent que d’autres coupables d’indigestion. Le contraire me paraît même démontré.

Puis, je vais montrer que vous et la morale avez des préceptes en parfaite contradiction les uns avec les autres, ce qui du reste n’est pas rare (quant à la morale, bien entendu).

Si je dis à la morale et à vous que Fourier demande une grande habileté dans l’agronome, qu’il veut que les meilleurs végétaux soient choisis et cultivés avec soin par les meilleures méthodes, que l’on élève de préférence les légumes les plus savoureux, les fruits les plus suaves; si je dis la même chose des soins à donner à la basse-cour, aux étables, etc.; si je dis tout cela, vous et la morale applaudirez à tous ces raffinements, car il n’est pas encore permis d’avancer cette absurdité, que ce qu’il y a de plus moral en agriculture, c’est de cultiver grossièrement, sans choix ni méthode.

Mais morale et moraliste, vous êtes bien habile l’un et l’autre si vous parvenez à donner un sens à ce double précepte : raffiner la production pour une consommation obtuse. Quel stimulant pour le jardinier s’il travaille pour des palais sensible seulement aux charmes du noir brouet, pour des estomacs qui feront cas d’un fade potiron à l’égal du cantaloup le plus parfumé ! Comprendrez-vous donc enfin que la consommation et la production sont deux choses qui marchent parallèlement, et que l’on ne peut agir sur l’une sans agir sur l’autre dans le même sens ?

Ainsi, dans cette même feuille, où hier nous avions à nous défendre parce qu’on nous accusait d’attaquer la propriété, nous devons nous défendre aujourd’hui parce qu’on nous accuse d’en être partisans exclusifs. Peut-être, en nous voyant ainsi, comme autrefois les Sabines, entre deux armées prêtes à en venir aux mains, finira-t-on par comprendre que nous marchons isolés entre les deux bannières, parce que, hommes de conciliation, nous apportons la parole qui doit pacifier et réunir.

Nous devons dire, en terminant, que l’ouvrage, par la forme, le style, la nature des raisonnements, ne s’adresse qu’aux penseurs. Il est hors de portée des classes populaires, et ne peut devenir un nouveau péril pour notre société que la moindre secousse, hélas ! peut faire crouler sur ses bases vermoulues.

H. R.

R., « Qu’est-ce que la propriété ? Par J.-B. Proudhon, » La Phalange, IIIe série, 1 no. 19 (14 Octobre 1840) : 339-343.

We extract from the Impartial of Besançon a very good article containing a refutation of a book by Mr. Proudhon, entitled: What is Property? This article is the work of one of our friends, M. Hippolyte Renaud, artillery captain. It should be noted that none of the more or less conservative newspapers, which sometimes accuse us of wanting to destroy Property, without providing any evidence to support their accusations, has tried to reduce the true value of the false theories recently directed against Property by Egalitarians, Communists and Bavourists. It was necessary for a phalansterian, that is to say an enemy of Property, following the opinion of some of the sheets that fight us without knowing us, to produce in favor of Property the arguments that he so-called defenders of Property do not know how to find.

What is Property? By P.-J. Proudhon.

Paris, 1840.

What is Property? This is the title of a memoir by M. Proudhon; such is the question, perhaps pregnant with more than one storm, which he rashly poses, and which he slashes, even more rashly, with this answer: Property is theft!

The proletarian has nothing to claim, some say: the proprietor is a thief, replies M. Proudhon. Where, my God! can such unintelligent negations lead?

Is it not obvious, a priori, that every man has the right to live? Is it less obvious, to anyone other than a philosopher, that each man has the right to enjoy the fruit of his labor? The right to live carries with it the right to work: the right to enjoy the fruit of one’s labor establishes the right to property.

In the origin of things, somewhere perhaps, tired of chasing wild animals with stones, a man used his leisure time to imagine and shape a bow: this bow became property. Who will dare to claim that one of his companions, lazy or unskilled at imitating, could have just stolen this bow by saying: To each his turn.

And if the industrious man, feeling that the possibility of giving is the sweetest privilege of wealth, makes a second bow for a friend, who will say that this friend has not become an owner in an equally sacred capacity?

Thus, man is the legitimate owner of what he has created through his industry, or of what he obtains through the voluntary abandonment of a previous owner.

The property is also constituted, it is said, by right of first occupant. We cannot accept this principle in its absolute meaning.

Certainly, Robinson, after having chosen and cultivated the fields that were necessary for him, would have acted unjustly if he had forbidden a new castaway the cultivation of other parts of the island, or if he had demanded a fee for the abandonment of land that he had never possessed.

For his part, the castaway had no right to the crops and harvests prepared by Robinson.

But, you say, M. Proudhon, if several shipwrecked people arrive successively, all parts of the island will soon be occupied, and the latest arrival will no longer find a place to settle. Should he therefore die of hunger or live on alms?

Here all the economists have gone astray: this is why you were able to combat them with advantage. But you have not replied a word to the Phalansterian School, which you must know however, since you attack it on several occasions.

Well! Yhe last to arrive was to address those who had preceded him in these terms: “The island is the common domain of all the shipwrecked; it is not a product of your industry, it is a gift from God! Take what is yours, what you have created, your crops, your utensils, the improvement given to the land by clearing and cultivation, an improvement which may have tripled its value; but the original soil, such as you found it when you landed here, is mine as well as yours; I want my share, let’s measure and share!

“And, if you cannot return to me in kind what is mine, without stripping yourself of what is yours, give me the equivalent.”

This is how the proletarian of the island would speak: his complaint would be just, and it should be listened to. Giving everyone what they are due, reconciling seemingly opposing rights, that would be the problem. The economists of this corner of the earth would be put on notice, and they would have to provide the solution.

If they found it more convenient to resolve the difficulty by saying to the proletarian: We owe you nothing! they would thereby show their impotence and their radical ignorance concerning the question posed.

And if they still decided, in your way, by saying: Property is theft! they would demonstrate perfectly equal impotence and ignorance.

You are right in this part of your book where you prove to the economists that they are wrong. But because you say precisely the opposite of what they say, you think you are right, and in that you are wrong.

They tip the scales to the right; in your hands, it tilts to the left: neither of you weighs equally.

This is because, believe me, every theory is false and cannot be useful to some without harming others. The truth is conciliatory in essence. Without this, would nature be intelligent? Would God be good?

We cannot explain here how it is possible not only to converge, but also to support and develop the rights of the worker and the rights of the owner of capital. This would address the serious question of the organization of labor, a question which, thanks to the efforts of Fourier and his disciples, preoccupies the best minds today. I therefore refer you, for your complete edification, to a serious study of the works of the School, works of which you speak, like many others, before having tried to understand them.

Others, most recently Saint-Simonism, had already blamed property for the pain of our modern societies. M. Proudhon took two steps past them all, two big steps backward. To each according to his capacity, to each capacity according to his works! said Saint-Simonism. Ability and labor did not find favor in the eyes of M. Proudhon. Equality, he says, is justice! So everyone gets the same remuneration, whatever their contribution to society in terms of capital, work, or talent.

Who would voluntarily accept the yoke of this overwhelming equality? Who would give up the legitimate hope of rising through knowledge and services rendered? It is in vain that you defend yourself from the title of philosopher, Monsieur Proudhon; you are a more intense philosopher, since, according to the philosophical mode, instead of seeking the social form that suits man as he is, you give yourself the mission of changing human nature to bend it to your arbitrary plans, since you claim to stifle in the heart of man ambition, enthusiasm and the emulative passions, which can only be found there by the will of the Creator and for the good of all.

There is, moreover, a fair amount of justice to be done to the author: he does not tend to dazzle his reader with overly cheerful pictures of this future that he promises to humanity. Reading this book is a heavy nightmare: we are uncomfortable, we suffocate in the social environment that it provides a glimpse of. We believe we are surrounded by wretches, beaten by the winds on a ship without a compass and without a rudder, fighting over the corrupted remains of a supply that will run out. Captains, passengers, sailors, all have an equal and rigorously weighed share. And here it is justice, because if one eats more, there is a greater void in the stomachs of his companions in misfortune. So the reasonings of M. Proudhon can have some value, as soon as he supposes the entire species in this desperate state.

But, in conscience, M. Proudhon, if you push humanity out of its bed, it is because you have to offer it a more suitable asylum. However, the least it has the right to hope for is the full and complete satisfaction, for all, of material needs (food, housing, clothing): to what therefore are your declamations against the one who eats the share of the neighbor reduced, when everyone will have the necessities for their whole life, and very comfortable, well and solidly insured necessities?

Will your equal retribution cause one, more beautiful or more intellectual, to be less favored in love; will another obtain a greater sum of friendship, esteem, reputation, etc.? And if, as you recognize, you cannot touch these natural inequalities, what does one more inequality matter, a much less enviable inequality, since it only concerns the superfluities (I use the received expression) of the material life, the necessary, I repeat, being granted to all and in superabundance?

You will also see that by admitting inequalities, we become the best friends of equality, of the only equality that is allied with the nature of man.

You recognize, with Fourier, that nature, in its foresight, must have distributed to men inclinations and vocations in an exact relationship with the work they would have to carry out. Thus, when science has solved the problem of putting each person within reach of the task he must accomplish, each work will necessarily find its worker.

You should also have understood that man is endowed with several physical and intellectual faculties, that all have been given to him for him to use, and that he can only exercise them fully through a diversity of functions giving rise to all of his vocations.

Then no one will find himself absolutely inferior to all the others; all will show relative superiority on some point. This will suffice for the satisfaction of all self-esteem, because we always attach high importance to the thing that we cultivate successfully, because the extent of our mind is necessarily related to the value of our actions.

Thus, inequality between each of our physical and intellectual faculties, inequality in each remuneration they bring us, inequality of capital! All these inequalities will lead to a balance in perfect harmony with our passions and desires, while your philosophical equality is only a little regrettable and unnatural chimera.

Inheritance, when each person will necessarily find his functions, functions that he cannot leave, to move up or down, without pain for him and without damage to society; the inheritance, I say, when the father is without fear about the future of his children whose place in society is the result of their very nature, the inheritance will flow over a large number. Descendants, work companions, friends, sympathizers of all kinds will be called. Then, everyone will have a chance to receive; everyone, as Fourier says, will be able to win this lottery without having put in it. Then, the inheritance will have lost its profound immorality, because, reduced to this proportion, it will not determine the social position of the heir, who will no longer be able to rejoice at the death of the testator.

It should be noted that M. Proudhon’s somewhat serious attacks are addressed almost exclusively to territorial property. His criticisms, were they are founded, would simply prove that there is a defect in the mode of exercising property, and that it must undergo a transformation.

But this in no way affects the very principle of property, which consists of the right to own capital and derive income from it. We cannot conclude logically from the part to the whole.

I affirmed that M. Proudhon had understood nothing about the Phalansterian doctrine.

To justify my assertion, I take at random one of the accusations he makes against us. I find towards the end of the book, page 241:

“….. How, implacable adversaries of civilization (the disciples of Fourier), do they borrow from it the most disastrous things it has produced: property, inequality of fortune and rank, gluttony, concubinage, prostitution, — what do I know? — theurgy, magic and devilry…..” Among these reproaches, each as well founded as the other, I choose the one whose refutation will lengthen this article the least; I take gluttony: you, M. Proudhon, are responsible for the term.

Fourier wants us to educate the senses from an early age, to develop them through comprehensive and refined exercise. This refinement is sought today for hearing, sight and tact. Fourier thinks that the exclusion of smell and taste is in no way reasoned.

So early on we will cultivate the senses, seeking to make the child, and consequently the mature man, delicate and a connoisseur of good food as well as music, perfumes as well as paintings. But isn’t this delicacy of taste completely the opposite of gluttony, which consists, if I am not mistaken, in this beautiful property that certain stomachs enjoy of absorbing for a long time, a great deal and without selection.

The reproach of gluttony not being able to be sustained, you will move on to another: but why this refinement, this delicacy, this sensuality? Isn’t all this repressed by a healthy morality: then contempt for the table, the famous black broth, republican frugality, etc.?

First of all, I did not claim that man or child should eat beyond their appetite. I have never seen that at the table, the finest connoisseurs were more often than others guilty of indigestion. The opposite even seems to me to be demonstrated.

Then, I will show that you and morality have precepts in perfect contradiction with each other, which is not uncommon (as for morality, of course.)

If I say to morality and to you that Fourier requires great skill of the agronomist, that he wants the best plants to be chosen and cultivated with care using the best methods, that we preferably raise the most tasty, the sweetest fruits; if I say the same thing about the care to be given to the farmyard, the stables, etc.; if I say all this, you and morality will applaud all these refinements, because it is not yet permitted to advance this absurdity, that the most moral thing in agriculture is to cultivate crudely, without choice or method.

But moral and moralist, you are both very skilled if you manage to give meaning to this double precept: refining production for obtuse consumption. What a stimulant for the gardener if he works for palates sensitive only to the charms of black broth, for stomachs that will value a bland pumpkin as much as the most fragrant cantaloupe! Will you finally understand that consumption and production are two things that work in parallel, and that we cannot act on one without acting on the other in the same direction?

Thus, in this same sheet, where yesterday we had to defend ourselves because we were accused of attacking property, we must defend ourselves today because we were accused of being exclusive supporters of it. Perhaps, seeing us like this, as the Sabines once did, between two armies ready to come to blows, we will end up understanding that we march isolated between the two banners, because, men of conciliation, we bring peace. words that must pacify and unite.

We must say, in conclusion, that the work, in the form, the style, the nature of the reasoning, is only addressed to thinkers. It is beyond the reach of the working classes, and can only become a new danger for our society, which the slightest shock, alas! can collapse on its worm-eaten foundations.

HR

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Independent scholar, translator and archivist.