Other writings on New Caledonia:
- As Talamo: New Caledonian Tales (1897) [English translation]
- “Chez les sauvages,” L’Aurore 5. no 1309 (20 Mai 1901): 1.
- “Les Canaques de Touho,” L’Aurore 5. no 1312 (23 Mai 1901): 1.
- “Missionnaires et Canaques,” L’Aurore 5. no 1322 (2 Juin 1901): 1-2.
- “Chez les canaques,” L’Action 4 no. 1066 (27 février 1906): 1-2.
- Un drame à l’Ile de Pins, serial in La France libre, 28 mars – 22 juin 1920 (68 installments)
- Damê : poème canaque, serial in La France libre, 3 février – 28 mars 1920 (32 installments)
- Les déportés, serial in Le Quotidien, 5 août – 2 octobre 1925 (52 installments)
“Souvenirs de Nouvelle-Calédonie”
- “A Nouméa,” L’Aurore 5. no 1380 (30 Juillet 1901): 1-2.
- “Polynésiens et Mélanésiens,” L’Aurore 5. no 1383 (2 Août 1901): 2.
- “Une Prise de Possession,” L’Aurore 5. no 1384 (3 Août 1901): 2.
- “Débarquement aux Antipodes,” L’Aurore 5. no 1385 (4 Août 1901): 2.
- “Des Nouméa de l’Isle des Pins,” L’Aurore 5. no 1386 (5 Août 1901): 2.
- “Un Peu de Géologie,” L’Aurore 5. no 1389 (8 Août 1901): 2.
- “Les Déportés à l’Ile des Pins,” L’Aurore 5. no 1391 (10 Août 1901): 2.
- “Les Déportés à l’Ile des Pins,” L’Aurore 5. no 1395 (14 Août 1901): 2.
- “Les Déportés à l’Ile des Pins,”
- L’Aurore 5. no 1397 (16 Août 1901): 2.
- “Un Phénomène de Télépathie,” L’Aurore 5. no 1400 (19 Août 1901): 2.
- “Ces Bons Missionnaires,” L’Aurore 5. no 1402 (21 Août 1901): 2.
- “Ces Bons Missionnaires,” L’Aurore 5. no 1404 (23 Août 1901): 1-2.
- “De l’Ile des Pins à Nouméa,” L’Aurore 5. no 1406 (25 Août 1901): 2.
- “Au Télégraphe,” L’Aurore 5. no 1407 (26 Août 1901): 2.
- “Lyrisme—Damê,” L’Aurore 5. no 1408 (27 Août 1901): 2.
- “Damê,” L’Aurore 5. no 1409 (28 Août 1901): 2.
- “Damê,” L’Aurore 5. no 1411 (30 Août 1901): 2.
- “Damê,” L’Aurore 5 no. 1413 (September 1, 1901) : 2.
- “Damê,” L’Aurore 5 no. 1414 (September 2, 1901) : 2.
- “Damê,” L’Aurore 5 no. 1418 (September 6, 1901) : 2.
- “Damê,” L’Aurore 5 no. 1423 (September 11, 1901) : 2
- “Damê,” L’Aurore 5 no. 1441 (September 29, 1901) : 2.
- “Damê,” L’Aurore 5 no. 1443 (October 1, 1901) : 2.
Malato on New Caledonia in L’Aurore… [in progress]
CHEZ LES SAUVAGES
La Nouvelle-Calédonie a été — pour le malheur de ses habitants indigènes — découverte, en 1774, par le capitaine Cook et, en 1853, déclarée possession française.
Depuis on s’est occupé do civiliser sa population eu lâchant sur elle missionnaires, soldats, administrateurs, capitalistes et forçats. Grâce à l’introduction de tous ces éléments, important avec eux l’alcoolisme, la syphilis, la pédérastie, la propriété et la concurrence individuelles, la population des tribus a été diminuée des deux tiers, en attendant l’anéantissement total.
Pressurés par les exploiteurs ‘religieux, militaires et civils, les indigènes ont eu, on 1878, une suprême convulsion. Une révolte quasi-généra le, qui a duré dix mois, a coûté la vie à trois cents colons et ù trois mille Canaques.
Depuis, régnait l’ordre, le calme de la servitude.
Un monstrueux impôt de capitation imposé au Canaques, dépouillés préalablement de la plus grande partie de leurs territoires, a amené — c’était inévitable — une nouvelle révolte, bien moins importante parce que la vitalité est beaucoup moindre.
Il est difficile de tondre un chauve et tout autant d’extraire de l’argent de 3a poche d’un Canaque, parce que les Canaques n’ont pas de poches Qt qu’ils n’ont pas d’argent. Aussi, a-t-on mis eu oeuvre le procédé habituel : on a envoyé de la troupe dans la circonscription de Touho, là où le recouvrement de l’impôt était le plus difficile. Les Canaques malmenés se sont regimbes et un soldat a été tué.
Des nouvelles que nous recevons de Nouméa nous montrent que le mouvement, étouffé sans doute à l’heure actuelle, a été plus sérieux que ne l’annonçaient les télégrammes officiels, toujours menteurs. Les indigènes ont attaqué plusieurs postes isolés ; mais que peuvent les sagaies contre les lebels ! Un certain nombre de guerriers ont été tués.
La tribu des Poyes, qui a supporté tout la poids des procédés civilisateurs, est païenne. Elle possédait des cultures qu’on a saccagées, et, dans la région, il n’y avait pas de colons, d’employeurs, permettant aux « sauvages » de vendre leur travail pour acquitter l’impôt de capitation. Dans ces conditions, comment payer ?
N’importe ! Les Poyes refusent d’avaler les pains à cacheter des missionnaires. Dans ces conditions, pas n’était besoin de se gêner avec eux. Les fusils n’ont pas été fabriqués pour les chiens.
Ramollot est toujours de mèche avec Flamidien !
Ch. Malato.
Les Canaques de Touho
Nous parlions, avant-hier, du soulèvement des Canaques néo-calédoniens, dépouillés de leurs terres et mis dans l’obligation de verser à leurs spoliateurs un argent qu’ils ne possèdent pas.
Les journaux do Nouméa, arrivés ici par le dernier courrier, nous font assister à ces convulsions désespérées d’une race qu’on assassine au nom de la civilisation.
« Les Canaques courent au-devant de l’impôt de capitation », avait osé dire le gouverneur Feillet, très fier d’avoir inventé ce mode de dépouillement — on invente ce qu’on peut : d’autres ont inventé la poudre.
Or, l’impôt de capitation faisait courir les indigènes, mais non dans la direction indiquée par la présomptueux administrateur. Ils couraient même si vite que le gouverneur par intérim, M. Telle, héritant de la situation créée, crut devoir envoyer cent cinquante soldats du coté de Touho, où cette course canaque était particulièrement prononcée. .
Il faut être juste pour tous. Le capitaine Boërie, commandant cette colonne expéditionnaire, semble avoir quelque peu cherché à prévenir une effusion do sang. Il eut une entrevue avec Aman, chef de la tribu « païenne » des Poyes, et s’efforça de lui prouver qu’une résistance était impossible.
La tribu possédait quelques fusils, quarante-huit heures furent accordées par l’officier pour leur remise et pour le paiement de l’impôt.
C’était très beau, mais les Canaques n’en demeuraient pas moins insolvables. Le capitaine se décida à agir comme l’y forçait son triste métier.
Les cases abandonnées, sauf par trente-six indigènes, vieillards, femmes ou enfants pour la plupart, furent incendiées. Le feu fut également mis aux récoltes. Le reste de ; la tribu — environ trois cents Canaques — s’était réfugié dans l’impénétrable forêt couronnant les montagnes d’où se précipita torrentueusement la Tioaka.
Suivie, comme dans toutes les insurrections néo-calédoniennes, d’auxiliaires indigènes, guides, convoyeurs et rabatteurs de gibier humain, la colonne française se mit, en route, fractionnée en plusieurs détachements. Marches et contre-marche a étaient très pénibles dans ces gorges couvertes d’une brousse épaisse. La nuit, les Canaques pourchassés se prévenaient de colline à colline en allumant des feux. Sans doute, s’étaient-ils préparé des cultures dans ces régions inexplorées ; sans doute aussi, les habitants des villages voisins leur passaient-ils des vivres.
Au cours d’une de ces marches, le soldat Dabin fut tué d’une balle dans la tête.
Un ignoble journal de Nouméa, la France australe, feuille flamidienne et libre-parolière qui réclame l’extermination dos Canaques comme s’ils étaient des juifs, secrète les lignes suivantes :
Pauvre victime ignorée, tombée dans une embuscade sous la balle d’un Canaque! Héros obscur, mais qui n’en continue pas moins le long el glorieux martyrologe des braves, morts au champ d’honneur pour la Patrie…
Pour la Patrie, c’est-à-dire pour remplie les coffres de l’administration noumèenne et permettre aux missionnaires de Touho-Wagap de s’emparer des territoires païens. Nous avons des souvenirs très précis suc les frocards néo-calédoniens : nous en causerons quelque jour.
Ch. Malato.
Missionnaires et Canaques
Une communication, adressée au ministre des colonies par le gouverneur de la Nouvelle-Calédonie, annonce que la situation créée par les « troubles » survenus chez les Poyes est aujourd’hui réglée pacifiquement et que ces troubles étaient dus simplement à des « querelles de tribus ».
Nos bons fonctionnaires, en avançant de telles déclarations, se fient un peu trop à l’ignorance profonde où l’on”est en France de tout ce qui est questions coloniales.
Depuis 1876, époque où le révérend Père Roussel, missionnaire de Touho-Wagap, lançait ses ouailles fanatisées sur les païens de la Ti-Pindjié et provoquait ainsi la révolte du Chef Poindi-Patchili, jusqu’à ce jour, les indigènes non catholiques n’ont cessé d’être tracassés, exploités, peu à peu dépouillés de leurs terrains et finalement contraints à une lutte sans issue. Les « troubles » (charmant euphémisme !) dont parle la communication officielle sont simplement le résultat du système suivi jusqu’à ce jour.
Les Canaques convertis sont relativement protégés par les bons pères, qui se réservent jalousement le monopole de leur exploitation et connaissent à merveille l’art de plumer la bête sans la faire crier. Au contraire, les mécréants qui refusent obstinément de sa bourrer de pains à cacheter et de travailler pour les mariâtes sont soumis à toutes les rigueurs.
L’impôt de capitation, chef-d’oeuvre du gouverneur Feillet, est une monstruosité pure et simple. On vole préalablement les terres de ces indigènes qu’on est allé civiliser ou l’alcoolisme, la syphilis, la flamidianisme et les coups de Fusil, puis on veut les contraindre à donner de l’argent !
De tout temps, les missionnaires maristes ont su se défaire des obstinés qui refusaient de se courber devant leur goupillon ; de tout temps, ils ont su compromettre les païens, les entraîner dans des luttes sans issue par les provocations ou par les avances perfides des tribus catholiques.
En 1878, le missionnaire de Thio — le révérend père Morris — eut vent des projets insurrectionnels des chefs Atai, Aréki et Naina, réduits au désespoir par le vol de leurs terrains de culture. Et comme le nouveau gouverneur, le capitaine de vaisseau Olry, était, chose inouïe dans la marine, un républicain peu clérical, les bons pères pour lui faire pièce précipitèrent l’explosion des colères indigènes, entraînant les païens à la révolta par l’intermédiaire des Canaques catholiques de Thio, qui prirent part aux massacres de la Foa et de Boutoupari, puis brusquement firent défection et, un peu plus tard devinrent les auxiliaires des soldats contra ces frères de race qu’ils avaient entraines à leur mine.
Deux ans pins tard, le même missionnaire faisait disparaître le grand chef de Bourendy, suzerain des Thios, Kary, qui avait toujours obstinément refusé de se convertir. Un déjeuner suffit pour rendre poitrinaire et tuer en trois jours ce chef canaque d’une stature et d’une force herculéennes. Kary mort, son frère et sa tribu furent baptises en un tour de main et la suzeraineté fut déférée à l’ex-vassal, Filippo-Dopoua, chef des Thios, instrument imbécile du missionnaire.
Procédés analogues à Hienghene à l’égard du chef Philippe Bouarate, qui, à l’instar de Brutus, dont il ne connaissait certainement pas l’histoire, dut jouer la folie pour échapper aux embûches et même à la mort.
Les missionnaires actuels de Touho-Wagap, fidèles continuateurs des traditions du père Roussel, ont voulu avoir à eux les terrains dès païens, de plus en plus refoulés du littoral, où croit le cocotier, vers les montagnes arides dé l’intérieur. Et par les provocations des indigènes catholiques, par les instigations perfides, par la manière à la fois féroce et partiale dont ils ont déterminé la perception de l’impôt de capitation, les révérends ont provoque une nouvelle révolte, aussi fructueuse pour eux que mortelle pour lea indigènes.
Sans doute, mieux vaut encore pour ceux-ci tomber en combattant aveu leurs sagaies contre les lebels que périr affames. Cela atténue-t-il le crime des civilisateurs ?
C’est pour avoir vu d’aussi près que possible semblables choses que j’en parle.
Ch. Malato.
“Souvenirs de Nouvelle-Calédonie”
A NOUMÉA
— Terre à l’avant !
Cette nouvelle, pourtant attendue, met en révolution passagers et marins du Var. Il y a cent quarante-cinq jours que, partie de Brest, notre frégate a cinglé pour Nouméa, en suivant le chemin des écoliers : Palmas, Sainte-Catherine et un océan plutôt Glacial qu’Indien. Voyage au long cours qui, il y a vingt-six ans, pouvait compter dans la vie.
Pendant cinq mois, on a eu ù supporter les contacts brutaux, les rudoiements des autorités du bord, les vulgarités ou les rancoeurs de pauvres diables exaspérés, les disputes héroï-tragiques des passagères et, pardessus tout, un régime alimentaire exécrable. La vie incessamment commune a mis en révolte toutes les délicatesses, toutes lea fiertés, a fait saillir tous les angles, aussi bien chez les vint-cinq déportés entassés dans leur cage de fer que chez les immigrants libres et chez les soldats, en lutte perpétuelle aveu l’équipage, Quant aux trois cents forçats, empilés bien plus horriblement encore que les « politiques » dans les profondeurs de l’entrepont, sous le revolver incessamment tondu des gardes-chiourme, quelle vie a été la leur !
Vie de fauves pris au piège et matés, cachant leur rage sous les ploiements d’échine, serviles et furieux! Toutes les passions, tous les vices et toutes les déchéances frémissant dans cette géhenne !
Déjà on aperçoit, se profilant au loin, une bande noirâtre : c’est la terre néo-calédonienne découverte par Cook, la 4 septembre 1774. Plus près, un point de l’océan où les vagues semblent blanchir : c’est l’îlot sur lequel s’élève le phare Amédée. Un bon veut arrière nous pousse vers la rade de Nouméa et, pour entrer au mouillage avec toute la grâce désirable, le commandant se décide à utiliser la machine qui est censée actionner le Var. Pour la quatrième ou cinquième fois en cent quarante-cinq jours, un panache de fumée s’élève et vient planer au-dessus du navire. Le panache! voilà qui, à terre, a dû nous faire reconnaître pour français!
Peu à peu, tandis que le phare Amédée, surgi de l’océan émeraude, s’élève devant nous, droit comme un I, la côte sud-occidentale de la Nouvelle-Calédonie se dessine, surplombée par un entassement de montagnes. Le Mont Dore, a l’ouest de Nouméa, élève sa masse jaunâtre de sept cent soixante-quinze mètres. D’autres s’étagent dans le lointain.
A l’exception des déportés et des forçats, bouclés plus étroitement que jamais dana leurs cages, tout le monde est sur le pont, scrutant, dévorant des yeux cette terre où nous conduit le drame de la destinée. Lea immigrants volontaires, séduits par les racontars oraux et imprimée qui vantent la fertilité prodigieuse du pays, rêvent déjà concessions agricoles, troupeaux de ruminants et fortunes honnêtement gagnées par l’exploitation du travail indigène. D’enthousiastes Marseillais se voient à la tête du, commerce nouméen, correspondant avec les grandes maisons de Sydney et de Melbourne ; aussi ont-ils mis à profit le voyage pour s’assimiler quelques rudiments d’anglais, car « times is money, troun de l’air » !
Les femmes et enfants de déportés évoquent la vie familiale, reprise après l’orage qui a brisé leur foyer; ils songent an bonheur possible sur la terre d’exil, et aussi à l’amnistie. Une demoiselle sexagénaire, partie avec l’espoir secret de trouver épouseur, prépare ses oeillades les plus assassines et minaude agréablement. Quant aux soldats, heureux d’échapper aux tyrannies du bord, ils ruminent déjà des revanches traîtresses dans les cabarets ou dans la brousse sur les mathurins qui se sont payé leur tète. Dans l’armée, faut de l’esprit de corps, nom de Dieu ! Et leur idéal de vie pour les trois années qu’ils passeront à la Nouvelle n’est ni très exigeant ni très complexe : peu de service, du vin et des femmes !
C’est au milieu de toutes ces pensées diverses tourbillonnant dans les tètes, que nous franchissons, par la passe de Boulari, la ceinture de corail qui encercle la Nouvelle-Calédonie, ceinture où viennent s’aiv genter les flots vertâ et azur. Rasant le phare Amédée, qui ne peut nous le rendre, nous découvrons et côtoyons à tribord une petite île, verte comme le docteur Chevreul à cent et un ans : c’est l’Ile aux Lapins, ainsi appelée parce qu’on n’y rencontre aucun de ces animaux, ce qui constitue certainement un lapin de premier ordre. Puis, successivement, apparaissent à l’avant et disparaissent dans notre sillage, quelques autres écueils plus ou moins recouverts de végétation.
Enfin, voici l’Ile Nou, qui semble venir a notre rencontre avec ses pentes crayeuse et ses bâtiments pénitentiaires. C’est la capitale au bagne, tout comme Nouméa est le chef-lieu de la colonie, car la colonisation devra supplanter l’autre, se livrent en ce point du monde une lutte sourde de tous les instants. Ainsi en fut-il en Australie où les descendants des convicts, les premiers, réclamèrent la fin de la transportation pénale.
Derrière l’île Nou, c’est Nouméa qui apparaît avec Ses crêtes rougeâtres et dénudées : le Montravel, camp de classement des transportés, le sémaphore dont les grandes ailes s’agitent pour signaler notre approche, le « Cap Horn » qui fait face à la baie de la Moselle et au Quartier Latin.
Car Nouméa a son Quartier tout comme Lutéce. Et pourquoi pas ? À la vérité il y manqua Schaunard, Colline et Musette, qui sont remplacés par las artilleurs en ribotte à la poursuite des beautés canaques et ancillaires. Mais notre boul’Mich’ lui-même connait-il encore les héros de Murger, éliminés peu à peu par la pléiade bruyante et stupidement cossue des « fila à papa », vieillards de vingt ans qui rêvent entre deux bocks aux héritages à recueillir et aux dots à décrocher.
Notre frégate jette l’ancre dans la rade au milieu des bâtiments de tous tonnages et de toutes formes. Des salves éclatent : on salue, on est salué, conformément aux préceptes de la civilité, puérile et honnête.
Puis c’est une embarcation qui se détache du port et vient à nous. Des uniformes d’officiers de marine rutilent au soleil, à. côté le tricot blanc des canotiers; puis se détachent dos corps bruns et nus que nous considérons avec intérêt : positivement on dirait des hommes en chocolat.
Ces corps appartiennent â d’authentiques Canaques dont la civilisation a fait des larbins ou des policiers. Ils ont pour mission d’assister les gardes-chiourme pendant le débarquement des forçats. Dans leurs mains nerveuses, des sagaies et des casse-têtes; un linge roulé autour de leurs reins les protège contra les indignations de M. Bérenger.
Une vie nouvelle allait s’ouvrir pour les Européens exportés aux antipodes en raison de leurs opinions politiques et sociales. C’est de cette vie, peu confortable mais pleine de couleur locale, que je parlerai dans d’autres articles. Il est toujours bon d’être renseigné : nul ne peut prévoir l’avenir et les lois scélérates existent toujours.
Ch. Malato.
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