Anarchist Encyclopedia: Archies (Gérard de Lacaze-Duthiers)

ARCHIES

(du grec arché)

Cette terminaison désigne les différents pouvoirs qui exercent dans la société l’autorité et le commandement, pouvoirs néfastes à tous les points de vue, incapables d’assurer l’ordre véritable, qu’il s’agisse de la monarchie (monos, un seul), pouvoir laissé à l’arbitraire d’un individu, ou de l’oligarchie (oligos, peu nombreux), pouvoir d’une clique (une olig-archie d’hommes d’affaires, de politiciens, de guerriers, etc…, asservissant le monde à ses caprices, — cent tyrans au lieu d’un), ou de toutes les archies passées, présentes et futures. Qu’elle soit l’expression de la volonté d’un seul ou de plusieurs, l’archie suppose la division de l’humanité en maîtres et esclaves, tous incapables de se diriger eux-mêmes. — Hiér-archie (gr. hieros, sacré). La société ne peut pas se passer d’une hiérarchie. Celle-ci découle de l’autorité même ; les individus sont subordonnés les uns aux autres, les uns commandent, les autres obéissent, les uns occupent le faite de l’édifice, les autres les plus bas degrés, les riches et les puissants ne pouvant pas plus se passer des pauvres et des petits que ceux-ci ne peuvent se passer d’eux. Partout des classes, des castes, des barrières, des divisions, des distinctions… Les individus ne diffèrent pas entre eux par l’originalité (ils sont tous pareils, également tarés), mais par le titre, le costume, la fonction, le galon… Le principe de toute hiérarchie consiste dans la subordination des inférieurs aux supérieurs (ce qui est arbitraire, rien ne prouvant la supériorité de ceux qui, chargés de diriger les esclaves, sont également esclaves, de ceux qui, maîtres de la société, ne le sont pas d’eux-mêmes). Il faut, dit-on, une hiér-archie pour assurer le bon fonctionnement de l’Etat. Que deviendrait une société dans laquelle chacun ferait ce qu’il voudrait? Ce serait l’arbitraire. Or, que voyons-nous dans une société hiérarchisée, sinon le triomphe du désordre? Nul n’est à sa place, nul ne remplit son rôle, chacun croit faire ce qu’il veut et ne fait que se rendre insupportable au voisin : c’est le bon plaisir des dirigeants qui domine, offrant le spectacle d’une incohérence inimaginable, servie et soutenue par la veulerie des dirigés. La hiérarchie n’est qu’une subordination des intelligents aux imbéciles. C’est une hiér-archie à rebours, une mystification. — Synarchie (gr. sun, avec). Union, solidarité des archies. Synthèse de gouvernement, loi d’organisation sociale. D’après St-Yves d’Alvevdre, Barlet, Lelay et Papus, il existe une analogie entre la loi qui dirige l’homme et la loi qui dirige la société. Les divisions de l’organisme humain (ventre, poitrine, tête) se retrouvent dans la société (économie, pouvoir, autorité). La syn-archie établit une fois pour toutes (?) la loi des dirigeants et des dirigés. Théorie contestable. — Ant-archie. Le préfixe ant désigne la lutte contre l’archie. Il est employé ici comme dans anti-cléricalisme, anti-alcoolisme, anti-social, anti-esclavagiste, anti-révolutionnaire, anti-militarisme, anti-patriotisme, etc… tandis que le vocable anarchie signifie l’absence même de toute archie, la suppression de toute autorité, désigne une attitude audessus et en dehors comme a-légal, a-patriote, a-social, a-religieux, a-clérical, a-moral, a-politique, a-nomie (absence de loi imposée du dehors à l’individu, sa propre loi), etc… L’ant-archiste n’a pas le désintéressement et la noblesse de l’an-archiste (l’anti désignant une attitude politicienne, utilitaire, in-esthétique). Cependant, an-archie n’implique pas une indifférence absolue à l’égard du monde social : se placer au-dessus de l’autorité, c’est entrer en conflit avec elle. Néanmoins, on peut échapper à l’idée fixe de la combattre, idée qui finit par engendrer l’esclavage, en nous subordonnant à ce que nous combattons, et nous fait employer les mêmes armes que l’adversaire. L’an-archie est préférable sous tous les rapports à l’ant-archie. — Aut-archie (ne pas confondre avec le vocable précédent) gouvernement de soi-même (autos), self-government des Anglais, système d’autonomie morale préconisé par La Réveillère-Lepault. Anarchie à l’usage des gens du monde et des vieux militaires. Convient aux fonctionnaires retraités, aux correspondants de sociétés savantes, aux professeurs d’énergie… L’autarchiste admet l’Etat, l’autorité, la propriété, la loi, la hiérarchie. Il a de l’honneur une conception traditionnelle. Il est, il est vrai, ennemi de certains préjugés et de la routine administrative. Il ne fait pas de politique (?). C’est un réformiste. L’autarchiste suit les offices religieux ou se contente de croire en l’Etre suprême : M. Homais est autarchiste. L’autarchie, qui prétend avoir son fondement dans l’autonomie individuelle et la liberté de penser, comme l’an-archie, poursuit un but différent. Tandis que l’an-archie fait table rase du social (dans la mesure du possible), l’aut-archie tient compte du social. Tandis que l’an-archiste s’efforce de rompre tout lien avec le monde dit civilisé, de profondes attaches retiennent l’autarchiste au passé. Il n’est pas libéré. Il est altruiste, ne repousse pas l’association (La Réveillère admet même une autarchie communale), accepte l’organisation sociale avec des remaniements, des modifications, reste dans la légalité. L’autarchie est un compromis.

Autres mots forgés avec archie : idiarchie (gouvernement par l’idée) ; logo-archie (théorie préconisant le lien entre les socialistes rationnels, logo-archistes (logos, lien)) ; poly-archie (polus, plusieurs) : le régime républicain est une poly-archie ; pan-archie (pan, tout) : on peut dire que la Société tout entière est une vaste pan-archie : l’autorité y exerce sa tyrannie sous toutes les formes, y déploie son incohérence sans limites. Ce système ramène le monde entier à l’autorité ; archiste (partisan de l’archie). 

Gérard de LACAZE-DUTHIERS.

ARCHIES

(from Greek arché)

This ending designates the different powers that exercise authority and command in society, powers that are harmful from every point of view, incapable of insuring true order, whether it is a question of monarchy (monos, one alone), power left to the arbitrary will of one individual, or of oligarchy (oligos, few in number), the power of a clique (an olig-archy of businessmen, politicians, soldiers, etc…, enslaving the world to its whims, — one hundred tyrants instead of one), or of all the archies past, present and future. Whether it is the expression of the will of one alone or several, archy suppose the division of humanity into masters and slaves, all incapable of governing themselves. — Hier-archy (Gr. hieros, sacred). Society cannot do without a hierarchy. This follows from authority itself. Individuals are subordinated to one another. Some command and others obey. Some occupy the highest reaches of the social edifice and some the lowest degrees, the rich and powerful not being able to do without the poor and lowly any more than the latter can do without them. Everywhere there are classes, castes, barriers, divisions, distinctions… Individuals do not differ among themselves in originality (they are all alike, equally corrupted), but by title, costume, function, grade… The principle of every hierarchy is the subordination of inferiors to superiors (which is arbitrary, nothing proving the superiority of those who, charged with directing the slaves, are equally enslaved, from those who, masters of society, are not masters of themselves.) A hierarchy is necessary, it is said, to insure the proper functioning of the State. What would become of a society in which each did what they wished? It would be arbitrary. But what do we see in a hierarchized society, if not the triumph of disorder? No one is in their place, no one fulfills their role, each things to do what they wish, but only makes themselves insufferably to their neighbor: it is the good pleasure of the rulers that dominates, offering the spectacle of an unimaginable incoherence, served and maintained by the spinelessness of the ruled. Hierarchy is only a subordination of the intelligent to the imbeciles. It is a hier-archy overturned, a mystification. — Synarchy (Gr. sun, with). Union, solidarity of archies. Synthesis of government, law of social organization. According to St-Yves d’Alvevdre, Barlet, Lelay and Papus, there exists an analogy between the law that directs human beings and the law that directs society. The divisions of the human organism (stomach, chest, head) are also found in society (economy, power, authority.) Syn-archy establishes once and for all (?) the law for the rulers and the ruled. A questionable theory. — Ant-archie. The prefix ant designates the struggle against archy. It is emplyed here as in anti-clericalism, anti-alcoholism, anti-social, anti-slavery, anti-revolutionary, anti-militarism, anti-patriotism, etc… while the term anarchy signifies the very absence of all archy, the elimination of all authority, designates an attitude above and outside, as in a-legal, a-patriotic, a-social, a-religious, a-clerical, a-moral, a-political, a-nomie (absence of law imposed from outside on the individual, their own law), etc… The ant-archist lacks the selflessness and nobility of the an-archist (the anti designating a polical, utilitarian, non-aesthetic attitude.) However, an-archy does not imply an absolute indifference with regard to the social world: to place oneself outside of authority is to enter into conflict with it. Nevertheless, we can escape the fixed idea of combating it, an idea that ends by engendering slavery, by subordinating us to what we combat, and makes us use the same weapons as the enemy. An-archy is preferable in all respects to ant-archy. — Aut-archy (not to be confused with the previous term) government of oneself (autos), the “self-government” of the English, a system of moral autonomy recommended by [Louis Marie de] La Réveillère-Lepault. Anarchy for the use of the fashionable and old military figures. Suitable for retired civil servants, the correpondents of scientific societies, energetic professors… The autarchist accepts the State, authority, property, law and hierarchy. He is proud to have a traditional conception. He is, it is true, the enemy of certain prejudices and of administrative routine. He does not play politics (?). He is a reformist. The autarchist attends religious services or is content to believe in the Supreme Being: M. Homais [in Madame Bovary] is an autarchist. Autarchy, which claims to have its foundation in individual autonomy and liberty of thought, like an-archy, pursues a different end. While an-archy makes a tabula rasa of the social (to the extent that it is possible), aut-archy takes the social into account. While the an-archist strives to break every link with the so-called civilized world, profound attachments tie the autarchist to the past. He is not liberatred. He is altruistic and does not reject association (La Réveillère even recognized a communal autarchy), accepts the organization of society with reshufflings, modifications, and remains in the realm of legality. Autarchy is a compromise.

Other words constructed with archy: idiarchy (government by the idea); logo-archy (a theory recommending the link between rational socialists and logo-archists (logos, link)); poly-archy (polus, several): the republican regime is a poly-archy; pan-archy (pan, all): we can say that all of society is a vast pan-archy: authority exercises its tyranny there in all forms and spreads its limitless incoherence. This system reduces the entire world to authority; archist (partisan of archy.)

Gérard de LACAZE-DUTHIERS.

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2 Comments

  1. The term Autarchy in Greek (Αυταρχία) means Authoritarian. If Monsieur Gerard was alive (yes, I know he is not), I would have recommended he use the term Autonomous (Αυτόνομος), which means self-governing. I really like the distinction he makes between ant-archy and an-archy. You see a lot of the first, posing as the second. It is one of the reasons Anarchy is failing as a movement: because it is constantly falling into reaction against authority, instead of community building.

    • Ant-archie seems to have been Lacaze-Duthiers’ invention, but with autarchie, he was apparently referencing a specific French tendency. He cites La Réveillère-Lepault, but perhaps the reference was supposed to be to Paul-Emile-Marie Réveillère, who wrote a series of books under the general title of “Autarchie.”

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